31 août 2007
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C'est toujours la même chose quand je termine un polar. Instantanément je suis projeté presque vingt ans en arrière, j'ai 12, 13 ans, et la chambre d'amis est devenue ma chambre à moi tout seul. La moquette et la tapisserie sont encore à la mode du début des années 80, un mélange de marron et d'orange et la lumière tamisée de ma lampe de chevet donne une atmosphère inquiétante à la pièce, la nuit. Je lis toujours très tard et, après avoir dévoré avant le collège tout ce qui pouvait exister de Club des Cinq et de TKKG, je me suis mis rapidement à Agatha Christie et à Gaston Leroux.
Agatha c'est une histoire d'amour qui dure depuis longtemps, c'est mon quatre heures tu sais : tu n'as pas vraiment envie de manger mais tu vois ça et ça te fait envie, ça te donne même envie de remanger le soir.
Agatha Christie pour moi, c'est ça, et même si je ne me rappelle plus vraiment le premier que j'ai lu (était-ce Le crime de l'Orient-Express, les Dix petits nègres, Mort dans les nuages ?), eh bien depuis vingt ans, dès que je n'ai plus vraiment envie de lire, je me prends un petit roman d'Agatha Christie, je patine un peu, je le dévore ensuite et il me vient une fringale irrépressible de livres...
Mais je digresse, je digresse. Je viens de finir un polar, là, c'était hier soir, sur les coups de deux heures du mat. Je suis seul, dans ma chambre d'hôtel, glauque au possible, murs peints à l'ocre, au gant, il ya longtemps, murs poisseux, un peu effrités, lumière blâfarde. Le roman est là, à côté de moi, terminé, Un peu plus loin sur la droite de Fred Vargas, le tueur démasqué, méchant, fou alors qu'on le croyait doux et gentil, je suis sur le point d'éteindre la lumière mais quelque chose m'en empêche.
Ce quelque chose il se situe vingt en arrière, c'est plutôt quelqu'un même. Il s'appelle Frédéric Larsan. C'est invariable. A chaque fois que je termine un polar, projeté vingt piges avant, je me retrouve dans ma chambre jaune orangé, le livre de Gaston Leroux dans les mains, fasciné par la maîtrise de l'écriture et happé hors du livre par la moindre ombre projetée sur le mur, à chaque chapitre terminé je me baisse pour regarder sous le lit et je me remets à lire jusqu'à des heures indues et même après avoir arrêté, le coeur battant, l'oeil et l'oreille à l'aguet, je reste de longues minutes sans pouvoir trouver le sommeil, à la fois terrorisé et gourmand, avide d'y retourner, dans cette terreur...
Et moi à trente ans passés, comme à quinze, vingt, vingt-cinq, je n'ose pas encore éteindre la lumière, je savoure cet instant où l'écrivain a réussi à renverser tout ton monde et à te faire accepter le sien, où tout est possible, où ton plus proche parent devient un étranger, et invariablement je passe du Mystère de la Chambre Jaune au Meurtre de Roger Ackroyd, de ma bonne Agatha et me voilà mué en tueur moi-même, narrateur schizophrène et toute confiance en qui que soit me quitte... Paralysé, fasciné, je laisse mon esprit divaguer vers ces heures de lectures interminables et mon esprit se détend, l'adulte reprend le pas sur le pré-ado rêveur. J'éteins la lumière.
J'ai envie de lire.
Agatha c'est une histoire d'amour qui dure depuis longtemps, c'est mon quatre heures tu sais : tu n'as pas vraiment envie de manger mais tu vois ça et ça te fait envie, ça te donne même envie de remanger le soir.
Agatha Christie pour moi, c'est ça, et même si je ne me rappelle plus vraiment le premier que j'ai lu (était-ce Le crime de l'Orient-Express, les Dix petits nègres, Mort dans les nuages ?), eh bien depuis vingt ans, dès que je n'ai plus vraiment envie de lire, je me prends un petit roman d'Agatha Christie, je patine un peu, je le dévore ensuite et il me vient une fringale irrépressible de livres...
Mais je digresse, je digresse. Je viens de finir un polar, là, c'était hier soir, sur les coups de deux heures du mat. Je suis seul, dans ma chambre d'hôtel, glauque au possible, murs peints à l'ocre, au gant, il ya longtemps, murs poisseux, un peu effrités, lumière blâfarde. Le roman est là, à côté de moi, terminé, Un peu plus loin sur la droite de Fred Vargas, le tueur démasqué, méchant, fou alors qu'on le croyait doux et gentil, je suis sur le point d'éteindre la lumière mais quelque chose m'en empêche.
Ce quelque chose il se situe vingt en arrière, c'est plutôt quelqu'un même. Il s'appelle Frédéric Larsan. C'est invariable. A chaque fois que je termine un polar, projeté vingt piges avant, je me retrouve dans ma chambre jaune orangé, le livre de Gaston Leroux dans les mains, fasciné par la maîtrise de l'écriture et happé hors du livre par la moindre ombre projetée sur le mur, à chaque chapitre terminé je me baisse pour regarder sous le lit et je me remets à lire jusqu'à des heures indues et même après avoir arrêté, le coeur battant, l'oeil et l'oreille à l'aguet, je reste de longues minutes sans pouvoir trouver le sommeil, à la fois terrorisé et gourmand, avide d'y retourner, dans cette terreur...
Et moi à trente ans passés, comme à quinze, vingt, vingt-cinq, je n'ose pas encore éteindre la lumière, je savoure cet instant où l'écrivain a réussi à renverser tout ton monde et à te faire accepter le sien, où tout est possible, où ton plus proche parent devient un étranger, et invariablement je passe du Mystère de la Chambre Jaune au Meurtre de Roger Ackroyd, de ma bonne Agatha et me voilà mué en tueur moi-même, narrateur schizophrène et toute confiance en qui que soit me quitte... Paralysé, fasciné, je laisse mon esprit divaguer vers ces heures de lectures interminables et mon esprit se détend, l'adulte reprend le pas sur le pré-ado rêveur. J'éteins la lumière.
J'ai envie de lire.
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